Les effets de la pression sur la sphère ORL.

 

 Que l’on soit apnéiste ou chasseur sous marin, voire plongeur en bouteille, notre corps est soumis à une pression d’autant plus grande que la profondeur est importante. Cette pression exercée sur l’ensemble du corps va avoir des conséquences diverses auxquelles nous devrons nous adapter sous peine de subir des douleurs ou traumatismes…

Les premières difficultés rencontrées se situent au niveau du crâne et de ses cavités aériques.

En effet, l’oreille moyenne et les sinus sont des cavités remplies d’air (donc sensibles aux variations de pression) et entourés de parois rigides (donc non-déformables). Ainsi, lors de la descente se constitue une différence de pression entre l’extérieur et l’intérieur. Si cette différence de pression s’accentue, elle génère une souffrance soit de l’oreille soit des sinus et les premières douleurs apparaissent.

 

I)                 Quelques descriptions anatomique.

 

A. L’oreille.

 

L’oreille est l’organe de l’audition et de l’équilibre. Le tympan sépare l’oreille externe (pavillon, conduit auditif externe) de l’oreille moyenne (osselets). L’oreille interne abrite les cellules nerveuses de l’audition et de l’équilibre. La pression dans l’oreille moyenne doit être égale à la pression dans l’oreille externe pour éviter les traumatismes. Ceci est possible grâce à la trompe d’Eustache qui permet un passage d’air entre l’oreille moyenne et le fond du nez (cavum). Ce conduit cartilagineux ne permet un passage d’air que dans certaines conditions : déglutition, bâillements, augmentation volontaire de pression dans le cavum (manœuvres).

 

 

  

 

B. Les sinus.

 

Les sinus sont des cavités aériques développées dans les os de la face. Ces cavités sont recouvertes de muqueuse et se drainent dans les fosses nasales via de petits canaux appelés ostium sinusien. Ces canaux peuvent se boucher en cas d’inflammation, d’infection ou d’obstruction mécanique ce qui rend l’équilibrage de la pression difficile. En dehors de ces conditions, le passage d’air se fait naturellement.

 

 

 

 

 

 

II)              Quand la profondeur augmente.

 

La pression exercée sur les cavités aériques  du nez ou de l’oreille est directement liée à la profondeur à laquelle nous nous trouvons. De plus, c’est dans les premiers mètres que les différences de pressions sont les plus importantes. En effet à 10 mètres sous la surface de l’eau, la pression augmente de 100 %   (P=2 Bars) alors que si on descend encore de 10m elle n’augmente plus que de 50%  (P=3 Bars) .

Si on ne compense pas, la pression dans l’oreille moyenne et dans les sinus reste égale à la pression atmosphérique, il se crée donc un déséquilibre entre les deux milieux à l’origine d’une souffrance.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

A. L’oreille.

 

Lors de la descente, le tympan est aspiré vers l’intérieur de l’oreille moyenne. En l’absence de compensation, on commence à ressentir des douleurs qui vont s’intensifier en descendant. On risque alors une déchirure du tympan.

 

 

 

B. Les sinus.

 

Les sinus communiquent avec les fosses nasales. La pression intra-sinusienne et la pression atmosphérique  sont naturellement équilibrées. La ventilation des sinus se fait par les méats sinusiens.

 

Toutefois en cas de sinusite, les méats sinusiens sont inflammés, donc bouchés empêchant ainsi les pressions de s’équilibrer.

Si l’on ressent des douleurs sus-orbitaires (au dessus de l’œil) c’est que l’on souffre d’une sinusite frontale alors qu’en cas de sinusite maxillaire la douleur est plutôt sous-orbitaire ou dentaire.

 

 

 

 

 

 

 

III)          Les solutions.

 

Dans tous les cas les solutions consistent à apporter une ventilation d’air suffisante dans l’organe en déficit afin de rétablir une pression équivalente au milieu extérieur.

 

A. La compensation.

 

La compensation se fait grâce à l’ouverture de la trompe d’eustache pour l’oreille.

Quand on descend, la pression dans l’oreille moyenne est plus faible qu’à l’extérieur, le tympan est donc aspiré, de même que la trompe d’eustache qui à alors tendance à se boucher d’autant plus (imaginez une paille dans laquelle vous aspirez l’air en bouchant l’autre extrémité). C’est pourquoi il est nécessaire de commencer les manœuvres de décompression le plus tôt possible, même à la surface. Ainsi on ne laisse pas la pression diminuer de manière trop importante et la compensation se fait en douceur.

Lorsque la trompe d’eustache s’ouvre, de l’air afflue dans l’oreille moyenne et l’équilibre des pressions se rétablit. Le tympan reprend alors sa place initiale.

 

Il existe 3 méthodes classiques pour forcer l’ouverture de la trompe d’eustache :

 

·        La BTV : Béance Tubaire Volontaire.

 

Il s’agit de la capacité à ouvrir la trompe d’eustache de manière volontaire. Certaines personnes arrivent à mobiliser les muscles qui entourent la trompe d’eustache pour la faire ouvrir. C’est la meilleure manière d’équilibrer les pressions puisque elle se fait de manière naturelle, progressive  et sans forcer.

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·        FRENZEL.

 

C’est une méthode qui consiste à faire remonter de l’air dans les fosses nasales en le poussant avec la langue. Une fois que la pression est suffisamment importante, cela force la trompe d’eustache à s’ouvrir. Elle fonctionne donc comme une soupape.

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·        VASALVA.

 

Le processus est identique à la manœuvre de Frenzel mais la mise en pression de l’air dans les fosses nasales se fait en se bouchant le nez et en soufflant. L’air, ne pouvant s’échapper, force sur la trompe d’eustache et l’oblige à s’ouvrir. C’est la pratique la plus couramment  utilisée.

 

 

 

Attention : les manœuvres de Frenzel et Vasalva peuvent être traumatisantes pour l’oreille car la trompe d’eustache s’ouvre brutalement et si la pression exercée est trop forte on crée une surpression sur le tympan (barotraumatisme).

Ces manœuvres doivent être exécutées tôt, avant l’apparition de douleurs et en douceur.

NB : à la remontée, il se produit l’effet contraire, la pression dans l’oreille moyenne augmente, gonfle le tympan vers l’extérieur et pousse sur la trompe d’eustache qui cette fois-ci va s’ouvrir sans difficultés.

Il ne faut jamais effectuer ces manœuvres lors de la remontée.

 

B. Thérapeutique. (consulter ORL)

 

Avoir les oreilles qui ne passent pas, même en utilisant les manœuvres de décompression, ressentir des douleurs aux sinus à la descente, etc…, tous ces phénomènes sont dus ou accentués par des maladies ou déformations anatomiques.

Par exemple, un simple rhume peut congestionner la muqueuse des fosses nasale et de la trompe d’eustache, une sinusite va boucher les canaux qui relient les différents sinus et donc empêcher l’équilibrage des pressions en empêchant l’air de circuler.

 

·        Au niveau des oreilles.

 

# Ne pas plonger lorsqu’on est enrhumé.

# Pratiquer un lavage de nez avant de plonger, pour nettoyer les fosses nasales.

# Ne jamais forcer lors des manœuvres.

# Arrêter la plongée en cas de vertige, d’acouphène (sifflement d’oreille) de                                                                  baisse auditive, de douleur d’oreille persistante, de saignement d’oreille.

# Consulter un spécialiste en cas d’apparition d’un de ces symptômes.

# Eviter la prise de vasoconstricteur nasal (déturgiloneâ, dérinoxâ…) avant et pendant la plongée, leur efficacité, malgré la ré-application, n’est que transitoire.

 

·        Au niveau des sinus.

 

 # Ne pas plonger lorsqu’on est enrhumé.

 # Pratiquer un lavage de nez lors de la mise à l’eau.

 # Ne pas plonger en cas de sinusite.

# Ne jamais forcer lors des manœuvres.

# Stopper la plongée en cas de douleur faciale violente, de saignement de nez (épistaxis).

# Consulter un spécialiste (certaines maladies favorisent la récurrence de ces problèmes et peuvent bénéficier d’un traitement).

 

IV)          Les Barotraumatismes.

 

Il s’agit d’un terme générique qui regroupe toutes les lésions induites par la différence de pression (dans l’eau ou dans l’air).

Au niveau sinusien le barotraumatisme correspond à la lésion de la muqueuse sinusienne due à l’augmentation de pression : elle se traduit par une douleur faciale (au dessus de l’œil pour le sinus frontal, au dessous pour le sinus maxillaire). Le saignement de nez du coté de l’atteinte est fréquent. Il faut arrêter de plonger et consulter un médecin. Le plus souvent tout rentre dans l’ordre après un traitement adapté et quelques jours de repos.

 

Au niveau de l’oreille, les barotraumatismes peuvent avoir des conséquences dramatiques : vertige aigu pendant la plongée avec risque de noyade (intérêt de plonger à deux), surdité, acouphène (sifflement d’oreille).

 

Ces traumatismes surviennent le plus souvent lorsque que l’on n’observe pas les règles de sécurité mais peuvent également survenir en l’absence de facteur favorisant.

 

Les différents traumatismes sont : 

·         Augmentation simple de pression dans l’oreille moyenne et interne sans lésion : douleur d’oreille, baisse d’audition, acouphène.

·         La rupture du tympan : douleur d’oreille, baisse d’audition, saignement d’oreille.

·        L’hyper pression de l’oreille interne (grave++) : vertige surdité, acouphène.

 

Les signes cliniques d’un barotraumatisme sont :

·        la douleur.

·        la baisse d’audition.

·        le vertige, ou l’état nauséeux.

·        le sifflement d’oreille (acouphène).

·        le saignement d’oreille (otorragie).

 

Dans tous les cas l’apparition d’un de ces symptômes doit conduire à l’arrêt de la plongée pour éviter l’aggravation. Une consultation médicale rapide permet de mettre en œuvre le traitement adéquat.

Avant l’apparition des barotraumatismes, il existe souvent des prémices (la manœuvre de Valsalva qui ne passe pas, un léger sifflement d’oreille, une légère douleur). Il faut alors temporiser, passer 30 min de repos sur le bateau avant de réessayer de plonger plutôt que de forcer. Un barotraumatisme sévère peut laisser à vie un plongeur à quai !!

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V)             Un autre cas lié à la pression : l’aspiration du masque

 

De même que l’oreille moyenne et les sinus, qui sont des cavités aériques, vont présenter une dépression lors de la descente, le masque va avoir tendance à se plaquer au visage dans un premier temps et lorsque l’élasticité  maximale de la jupe sera atteinte, on va noter l’apparition d’une douleur au niveau des yeux qui vont être aspirés dans le masque.

Ce phénomène peut aller jusqu'à la rupture de certains vaisseaux dans l’œil (hémorragie conjonctivale).

Il suffit tout simplement de lâcher un peu d’air par le nez pour remplir le masque.

Lors de la remontée, l’air du masque va se dilater et sortir par la jupe. Vous pouvez le ré-aspirer, alors ne vous privez pas de cette réserve d’air bonus !!

 

Guillaume Hotier

 

Je remercie le Dr Cartier César médecin spécialiste en Oto-rhino-laryngologie, qui a bien voulu médicaliser, documenter et corriger cet article.